mardi 30 novembre 2010

Suzanneries - Part V[engeance]

Adopted with Vendetta Syndrome
Give Suzan a chance

«C'est ce qui maintenant m'amène à vous parler d'un sujet très difficile pour moi : l'adoption.» avait dit Suzan, trémolo dans la voix, aux gens réunis à l'église pour les funérailles de son père : Granpapapaul. Suzan était douée pour les récits poignants, violon de la pitié qu'elle a toujours maîtrisé. L'assistance n'avait pas nécessairement les larmes aux yeux à cause de la mort de Granpapapaul, mais à cause des mots de Suzan, bien choisis, vrais, trop amers. C'était en effet en 1956 que Suzan avait été adoptée par un Granpapapaul, pompier adulé de Lachine, et par une Aiglantyne, tortionnaire des toutes premières souffrances suzanesques.

Comme l'avait remarqué plusieurs personnes, Suzan était en peine d'amour depuis sa naissance. «Môman, ahl'a entrepris des démarches pour retrouver sa vraie mère» racontait Suzan à Faniev et Piayeluc emplis de sympathie. Les découvertes nostalgiques de Suzan l'avaient menée sur ses vérités fondamentales, vérités encore plus tristes parce qu'elles semblaient en fait plus confortables que sa situation affective actuelle. Suzan était en fait originaire de la région de Québec. À sa naissance, elle avait été nommée Diane par sa mère qui était amoureuse d'un homme plus jeune qu'elle. Suzan affirmait simplement avoir été conçue dans l'amour, mais qu'à l'époque de sa naissance subsistaient encore beaucoup de tabous concernant la procréation hors mariage. Peut-être le plus douloureux et le plus dur à accepter pour Suzan, c'était de se faire dire que sa mère venait s'occuper d'elle à l'orphelinat, venait la nourrir, la bercer. Puis vint «le rejet», l'abandon. Voilà ce qu'était le tout premier et le plus grand drame de Suzan.

La petite Suzan avait eu la chance de tomber dans une bonne famille. «Yh sont v'nus me chercher, mais Yh m'ont jamais donné d'amour» murmurait souvent Suzan. Dévote et obsédée par les apparences, Aiglantyne avait adopté un deuxième enfant en la jeune Suzan parce qu'il fallait une petite fille assortie au petit garçon déjà adopté : le jeune Mononkpiaye. Le premier défaut de Suzan dans cette situation fut d'être l'opposée de Mononkpiaye, un jeune garçon modèle, poli, travaillant, calme, valeureux, habile de ses mains, honorant ses parents. On avait que des mots pour le jeune Mononkpiaye…Suzan était agitée, avait des troubles d'attention, était entêtée, aimait rire et ne prenait rien au sérieux contrairement à la terne et puritaine Aiglantyne. Piteuse, Suzan racontait souvent qu'Aiglantyne l'attachait à sa chaise haute et promenait sa fille dans le jardin au bout d'une laisse liée à la corde à linge, devant la consternation des voisins. Suzan se rendait compte que sa haute taille en tant qu'enfant était vue comme un handicap ou plutôt comme une tare obsène par sa mère : «Tu peux pas êt' grande quand t'es une fille» lui lançait-elle. L'enfance de Suzan fut donc vécue sous la forme d'un rejet avec un manque criant de tendresse et sous la gouverne autoritaire et haineuse d'une femme qui ne l'aimait pas ou le démontrait que très mal.

Adolescente et jeune adulte, Suzan aiguisait ses grands talents en devenir : la provocation, le sens du spectacle et la mobilisation des ressources menant à la vengeance. Suzan prit des mauvais plis pour plus tard : déterminer qui est l'ennemi et poursuivre le combat jusqu'au tombeau. Sa vie était orientée pour sa vindicte envers sa mère. Suzan mettait tout en œuvre pour mettre Aiglantyne à bout de nerfs : «j'voulais y'en faire baver comme ah me hn'a  fait baver» racontait Suzan à ses enfants. L'affront peut-être ultime fut de «tomber enceinte de Faniev» et de ne pas vouloir divulguer l'identité du père. «C't'enfant-là yh va êt' juste à moi, pis j'vais yh donner tout l'amour qu'j'ai po eu. Faniev c't'un enfant que j'désire tell'ment» racontait volontiers Suzan. Durant sa grossesse, à la suggestion de Granpapapaul, Suzan vint ré-habiter dans la maison familiale. Au souvenir de Faniev et à la grande surprise de Suzan, Aiglantyne, désormais Granmamantyne, fut empreinte de tendresse pour la très jeune Faniev. Suzan n'avait toutefois pas enterré la hache de guerre avec sa mère et quitta la maison avec bébé Faniev pour des raisons de tensions palpables entre les deux femmes.

Ensuite, en ligne droite dans le temps, grâce au magnétisme cosmique, une Suzan et un Robahir, lui aussi adopté, se rencontrèrent. Malgré son bonheur nouveau, selon toutes vraissemblances, enceinte de Piayeluc, Suzan n'avait pas oublié les velléités vengeresses inscrites dans sa programmation. Au grand dégoût et devant l'incrédulité de Robahir qui avait fait la paix avec le concept de l'adoption, Suzan soufflait de toutes ses forces dans de nombreuses flûtes de fête à l'annonce du cancer de sa mère. Festival de la mort, le boureau va mourir, Suzan auparavant en laisse était maintenant en liesse. Après vinrent les accrochages certains à l'hôpital avec Mononkpiaye et Granpapapaul qui furent les tristes témoins d'une Suzan d'hystérie qui s'adressait aux infirmières en insistant : «J'VEUX LA VOIR CREVER! JUSQU'À TEMPS QU'AH RESPIRE PU! J'VEUX M'ASSURER QU'AH SOIT MORTE!».                     


Au chevet d'Aiglantyne


lundi 29 novembre 2010

Suzanneries - Part IV[rogne]

Soulita galore
 Meet Soulita Whinehouse


«Voulez-vous des croques-monsieur avec du fromage pis du baicune?»
demandait Suzan à Piayeluc et ses amis réunis devant le «neetendeau» dans le salon. Rendons à Suzan ce qui est à Suzan, elle aimait plus que tout faire honte à ses enfants. En soit, Suzan était la vedette d'un spectacle grandiose qui faisait d'elle une membre du Lachine glitterazzi. Pleurons l'adolescence de Faniev qui fut un enfer sous les ''bonnes'' auspices de Suzan. Faniev durant ses soirées d'amies de d'Albayvio avait eu l'épouvantable surprise d'une Suzan courant à travers la maisonnée avec un étron dans un linge à vaisselle : «R'gardez les filles, Piayeluc m'a fait un beau cadeau! Siii sont beaux les cadeaux de Piayeluc!». Une Faniev mortifiée de honte assista à la scène de sa mère dans une course à relais qui voulait échanger des déjections à des adolescentes en panique devant ce caca hors du bol. Un troublant moment qui se voulait peut-être un remède à une soirée plate dans un sous-sol à Lachine. Platitude que Suzan chassait volontiers avec des visites dans les fêtes de salon de ses enfants pour venir prendre une puff de Marie-Jeanne sous les regards médusés de l'adolescence. Suzan en avait bien besoin, il faut dire que, par malheur, Piayeluc et Faniev ne participaient pas activement aux taches ménagères ce qui obligeait Suzan à se trouver une fréquentation qui ne la quitta jamais, le vin rouge. Boisson de Suzan...ménage de Suzan. Zombie éthylique de soir, Suzan se méritait le sobriquet de «Soulita» par un jeune Piayeluc apeuré. «Oh non! Maman! Pas Soulita!». Soulita était en fait un monstre saoul obsédé par le ménage créé par la paresse d'un Piayeluc livresque et cérébral aux mains trop douces pour laver la vaisselle et par une Faniev sportive qui travaillait au moins à deux endroits et qui était menstruée de l’attitude 28 jours par mois. Le plancher de la cuisine du cinq et demi au doux parfum d’eau de javel, l’enveloppante musique des brassées nocturnes de la laveuse, des brassières beiges qui sèchent sur les armoires et sur toutes surfaces visibles, voici le décor d’ambiance qu’avait conçu Soulita pour son propre rôle. Dans le Feng Shui inspiré par un vinnier 4 litres en carton, on ne faisait pas mieux.  

Soulita's

Parfois Soulita réveillait ses enfants pour parler de Robahir ou leur faire goûter ses noctambules créations culinaires. Piayeluc et Faniev redoutaient d'entrevoir dans le noir de leur chambre le point incandescent de la cigarette de Soulita qui brillait tel un joyau aux doigts de la princesse ivresse. Bruyante suzeraine de la boisson chevauchant sa monture, l'aspirateur, au beau milieu de la nuit  

samedi 27 novembre 2010

Suzanneries - Part III


Lyzett su' sa mustang
Gossiping Suzan


«Ton père ya pas le temps de s'occuper de toi, y'aime mieux jouer aux fesses» disait souvent Suzan au jeune Piayeluc. De l'autre oreille, dans la voiture de Robahir, eight years old Piayeluc entendait son père lui répéter sa fameuse blague sur Suzan : «Ta mère c't'une autruche... Ah'l a un gros cul, une p'tit tête pis ah' mange des graines». Dans l'esprit du jeune Piayeluc ces mots d'anatomie générale et de diète aviaire n'avaient heureusement aucun sens, mais son cerveau neuf avait enregistré les injures épiques que ses parents se lançaient à travers lui. Des sons et des mots inscrits à même les lèvres [mauves] de Suzan qui déversa son fiel sur son ex toute sa vie durant. Publique de choix, Faniev et Piayeluc ont entendu de Suzan chacune de ses histoires de Robahir au moins une centaine de fois et cela cinq, dix, vingt ans après les faits. Splendide et six foot two Suzan n'avait jamais refait sa vie après Robahir. Probablement une vie de servitude maternelle et de psaumes vindicatifs à ressasser la peine qu'elle avait vécu de son seul échec amoureux. Suzan commençait souvent ses phrases par «ma vie d'koupp...» et ne se terminait jamais. Robahir s'était «r'virer sur un di' cenne» et avait passer vite à [d'] autres choses [femmes] alimentant le discours suzanesque pendant les années à venir. «Lyzett, la blonde à ton père ah s'est fait avortée 3 fois...c't'une pitoune, ah'l a une mustang avec un détecteur de radaour...ton père sort juste avec elle parce qu'ah'l aime ça jouer aux fesses...j'm'demande ben c'que Mamie pis Papi disent d'elle...Mamie pis Papi t'en parlent tsu desfois de Lyzett quand ton père est pas là? Y disent quoi? Pis ta tante l'Île-Yan ah dit quoi?...Ils l'savent tsu, Mamie, Papi pis l'Île-Yan qu'ah'l a un gars pis ah été obligée de l'mettre en centr'd'accueil parce qu'ah s'occupait pas d'lui...» Suzan en avait beaucoup à dire et s'en faisait dire également : «J'te dirai pas qui qui m'a dit à St-Édouard que ton père pis Lyzett s'enferment toutt la fin de semaine dans maison pour jouer aux fesses». Suzan avait bien entendu gardé ses contacts dans l'humble hameau et fief de Robahir. Des matantes, des cousines, des voisines qui nourrissait Suzan d'histoires aussi croustillantes que malsaines. Suzan dans un besoin ultime de partage alla même jusqu'à une participation mémorable à une émission de Claire Lamarche intitulée «Un amour impossible» durant laquelle elle déclara qu'elle avait aimé un «courailleur de jupons». La semaine avant l'émission Piayeluc et Faniev se rappelèrent que Suzan, tel un whip en chef d'un parti politique, était très occupée à téléphoner à ses «j'te dirai pas qui» pour s'assurer que le tout Saint-Édouard regarde l'émission. «Mamie pis Papi y'ont tsu regardé Claire Lamarche? Qu'est-ce qu'y'ont dit?» avait demandé Suzan au jeune Piayeluc.

Par analogie et selon toutes vraisemblances, Suzan appliquait maladivement dans sa vie personnelle une méthode déjà connue dans sa cuisine : la bouillasse trop cuite. Mise en chaudron ensuite brassez, brassez, brassez, brassez jusqu'à ce que tout soit mou et peu délicieux : au téléphone discutez, parlez, analysez, interprétez, jasez, racontez, exprimez, ressassez, appelez, changez d'interlocuteur vingt fois, rappelez encore jusqu'au jour où le tour de la question a été fait en entier, reprenez votre souffle et puis, ensuite, recommencez jusqu'au tombeau. Obsessed and  relentless Suzan rencontrait évidemment des oreilles qui se refermaient poliment lors de ses discours, mais, de son entourage patient, personne ne lui fit jamais remarquer qu'elle était ancrée sur un rocher oublié par le temps. Telle une sirène chantante de l'anachronique, Suzan dévorait des alliés de taille par le choix douteux de ses chansons.


Schéma classique espéré par Suzan pour atteindre Robahir : Suzan à Piayeluc à Robahir

Schéma d'horreur pour Suzan : Suzan à Piyeluc à Robahir à Mamie - STOP - opinion de Mamie à Robahir à Piayeluc à Suzan = vaisselle cassée


En ce sens et de la manière la plus épouvantable, thirteen years old Piayeluc avait été déchu du son statut de fils de Suzan lorsqu'il avait raconté à Suzan que Robahir [dégoûté] avait dit à Mamie [encore plus dégoûtée] que Suzan avait dit à Piayeluc que la nouvelle twenty three years old blonde de Robahir était dans la vie de Robahir seulement «parce que les meussieux de l'âge de ton père y'aiment ça les jeunes de vingt-trois ans parce qu'elles ont encore le vagin ferme». Scandale! Mais qu'est-ce que Mamie pouvait maintenant bien penser de Suzan?




Condensé de croissance chinoise

Ne nions pas l'aspect vertigineux que prend le nombre 10 avec le symbole ''%'' lorsqu'il s'agit de croissance du PIB annuellement. Alors qu'il est autour et rarement supérieur au chiffre 2 pour l'Europe, le taux de croissance du PIB chinois donne le tournis. C'est ce que nous entendons à satiété : «La Chine est une championne de la croissance. La Chine est en plein développement. L'usine du Monde…» Également mentionne-t-on souvent la pollution cauchemardesque de la Chine, sa consommation énorme de pétrole, de ciment, de charbon etc. Le lien de causalité qui existe entre développement économique effréné et pollution monstre de l'environnement est élémentaire et est vécu partout depuis la toute première révolution industrielle. Cependant ce dont on parle rarement dans les reportages ou les articles sur la croissance chinoise c'est du coût relatif de cette élévation de leur richesse nationale. En fait ce qu'on nous dit moins souvent c'est que les Chinois paient très [trop] cher leur développement économique et les moyens préconisés pour arriver à la prospérité sont de lourds compromis aux conséquences parfois irréversibles. La Chine utilise de dangereux raccourcis à la croissance notamment avec le contrôle de sa monnaie et en misant beaucoup sur sa force première : sa grande démographie.


Monnaie talks

Les violons des grandes puissances commerciales résonnent ainsi (à quelques mots près) : «La Chine joue une concurrence déloyale en gardant le yuan artificiellement bas ce qui rend ses produits plus attrayants sur les marchés, ce qui boost ses exportations etc…». En effet, une monnaie à valeur basse rend les produits moins chers s'ils sont achetés avec des devises étrangères (qui valent plus cher) et c'est le choix de politique économique qu'ont fait les autorités chinoises en fixant la monnaie à une valeur précise libellée en dollar. La médaille cache, bien entendu, son revers : les importations vers le territoire chinois. Ce n'était pas ''caché'' pour les Chinois. Par décision consciente des autorités, il était convenu que pour motiver les exportations du pays, donc stimuler l'emploi, le développement industriel, les investissements étrangers et ainsi de suite, il fallait adopter une politique favorable malgré qu'elle puisse avoir un contrecoup. Certes, la Chine exporte, mais cet output n'a pas été créé avec du vent…la Chine a dû importer les matières premières. Or elle achète ces matières en devises étrangères, elle les paie donc PLUS cher parce que sa monnaie est PEU élevée : elle perd donc au change en les achetant à relativement fort prix. La Chine espère donc que ce qu'elle sortira de ses usines aura une plus-value supérieure à cette perte réelle qu'elle a subie en important les inputs de l'étranger. C'est très souvent le cas et c'est le pari qu'elle a accepté de faire, cependant, à valeur réelle et honnête de sa monnaie, la Chine aurait généré plus de richesse en bout de ligne, mais aurait risqué de vendre moins de ses produits usinés sur les marchés mondiaux. La Chine ne peut se permettre ce risque. Son peuple a goûté aux fruits de la croissance et les vives tensions sociales menacent de faire chuter le gouvernement et son paradigme absolutiste. Qu'adviendrait-il si des millions de travailleurs des usines chinoises seraient remerciés à cause d'une chute brutale des exportations? La politique monétaire de la Chine est en fait un choix malicieux qui repose sur des desseins de cohésion interne. Donc par souci de conservation du pouvoir, le régime communiste actuel, en quelque sorte et indirectement, fait payer relativement plus cher aux Chinois leur croissance.


Combustion incomplète

Analogie : Un four à bois dit efficace dégage davantage de chaleur pour une même quantité de bois qu'un feu de foyer en plein air. C'est en fait ce qui ce passe avec les économies développées d'un côté et l'économie chinoise de l'autre. Les rendements comparés d'une tonne de charbon aux États-Unis, en Europe, au Japon et en Chine montre que la Chine est loin derrière. C'est classique dirait-on. On pouvait s'attendre à ce qu'un pays en développement comme la Chine ait moins de rendement industriel sur une même quantité d'input, mais ce qui est préoccupant pour la Chine c'est l'échelle avec laquelle cette même tonne de charbon est mal consommée. Imaginez-vous la totalité de la côte d'un grand pays comme la Chine tapissée d'usines qui utilisent cette tonne de charbon de façon inefficace pour produire un bien de consommation et répéter l'expérience avec une tonne de ciment, d'acier…DE PÉTROLE…C'est en fait encore une décision politique qui est prise ici, celle du développement rapide. La Chine est certes en apprentissage industrielle, mais cette leçon imposée de développement économique se vit sur la totalité du territoire et souvent avec les moyens du bord occasionnant des pertes énorme, en masse et partout. C'est ce qui fait en sorte qu'un point de pourcentage de croissance économique chinoise est en fait plus coûteux pour les Chinois que le même point de croissance dans une économie développée. Multiplions ce point de croissance par 10 pour les besoins de la démesure chinoise et du ''tout et maintenant'' des impératifs de la croissance aveugle. Voilà la perte chinoise.

Il n'est pas clairement établi que l'utilisation de la main d'œuvre abondante en Chine pour effectuer diverses tâches soit en fait responsable de l'allocation non optimale des ressources de production. Il faudrait faire la comparaison de la productivité dans les pays industrialisés versus celle de la Chine, mais ce n'est pas le but de l'exercice. Cependant, ce qui a été décrit plus haut concernant les travailleurs chinois versus la stabilité de l'État est toujours vrai, c'est-à-dire que leur implication à grande échelle dans le travail industriel oriente les politiques vers la nécessité d'une croissance pour la paix sociale. Donc la Chine améliore son sort et implique sa population comme otage et bénéficiaire du développement et c'est sans pédale de frein de que le gouvernement est obligé d'opérer.    

Paul L’Ussion

La Chine est malade. Diagnostique : monomanie de la production. Symptome : fièvre d'exportation.  Cette manie se vit au détriment de la santé des Chinois. C'est un triste sort que l'on réserve aux cours d'eau, au sous-sol, aux terres cultivables et à l'air que l'on respire. L'obsession des rendements est telle et le besoin compulsif d'accéder à la richesse est si grand que le souci de l'habitat humain s'est, en fait, complètement oblitéré de la conscience chinoise. L'environnement est ici le fort tribut que la Chine a choisi de payer aux dieux du ''progrès''. La souillure tous azimuts de la nature est la preuve ultime que la Chine paie bien trop cher sa croissance économique. Ce sont les générations futures qui devront débourser pour nettoyer les dégâts et c'est un coût non comptabilisé de la croissance, car c'est un coût indirect et différé, mais il est réel!


Respirez la Chine

Certaines voix s'élèvent en Chine pour que l'on réglemente en matière de protection de l'environnement et que l'on arrête ce laisser-faire. D'autres journalistes plus ingénieux encore, demandent que les pays étrangers imposent une surtaxe aux produits chinois, car leur prix n'inclut pas le coût de production externe sur l'environnement de la planète. Nous comprenons bien que ces mesures peuvent être vues en Chine comme étant discriminatoires envers les produits chinois, mais c'est ici que la Chine doit agir et profiter de cette occasion pour innover et structurer son industrie pour qu'elle soit efficace et plus propre. L’opinion des Chinois aujourd’hui est que l’Angleterre et les États-Unis ont vécu leur industrialisation avec des barèmes de pollution quasi inexistants à l’époque et qu’eux, Chinois, ont aussi droit au développement. Bien entendu, la fée modernité brille pour toutes les nations, cependant la Chine devrait prendre conscience qu’elle a le choix et retire plus de richesse à se développer de façon plus propre.


La Chine est un dilemme proprement dit. Ses choix économiques sont unidirectionnels et sont garants d’une stabilité sociale temporaire. Cette motivation première pousse en fait la Chine à adopter une politique de croissance dite à deux chiffres et cela même si cette croissance lui coûte beaucoup plus cher qu’ailleurs (25% plus cher en 2009). Le peuple chinois peut ainsi se targuer que leur nation est une puissance économique, mais en vérité c’est une ogresse qui fume, qui tousse, qui boite et qui paye cher de sa santé pour courir plus vite. Sans doute la Chine accèdera au rang des nations avancées plus vite que les spécialistes le prédisent, car c’est un pays au grand potentiel humain…mais le prix payé n'en vaut certainement pas la peine.      

jeudi 25 novembre 2010

Suzanneries - Part II

Stew à Suzan

Suzan's Views on Cuisine

«Viens on va prendre un billet de mini loto! On va gagner pis on va placer l'argent à la banque pis on va retirer les intérêts sans toucher à l'argent!» déclarait souvent Suzan dans toute la sagesse fiduciaire qui était sienne. Mais quel régime de méritocratie classique Suzan avait-elle fui pour se retrouver dans un monde pareil où il n'y avait qu'une seule façon de se sortir de l'indigence : la «mini loto»!? Il ne faut pas penser que Suzan mettait tous ses œufs dans le même panier. Elle encourageait tout de même Piayeluc, son fils, à être «bon à l'école». «Mon fils c't'un génie, j'yai toutt donné quand qu'yé né…Y m'en reste pu!» rétorquait souvent Suzan aux intéressés qui s'enquéraient de la disparité de tempérament mère-fils. Une Suzan qui ne répondait à aucune question sans faire une ''blague'' qui se voulait drôle, une grimace ou une onomatopée suivant une pincée sur une fesse de l'interlocuteur. Un contraste saisissant avec la trace que ten years old Piayeluc laissait dans l'esprit des gens en s'époumonant sur la piètre condition agraire en Afrique de l'Est ou sur la viabilité d'un Québec souverain. Rien de nouveau sous le Soleil alors que four years old Piayeluc, junior aux négoces, avait fixé le montant de la pension alimentaire que Suzan recevait de Robahir. Déjà prise en charge par Faniev pour certains aspects de sa bourse, Suzan telle une mère veuve nigériane bénie par l'aide au foyer de ses 9 enfants, savait qu'elle pouvait également compter sur Piayeluc. Patiemment il enseignait à sa mère les rudiments de la cuisson rapide : «Tu pèses su' TIME/COOK, UN, ZÉRO, ZÉRO, START, maman si tu veux l'arrêter tu pèses sur CLEAR/STOP ou attend maman si tu veux aller plus vite tu pèses su' QUICK MIN, START et ça fait la même chose!». Une Suzan ébahie devant autant de termes anglais demandait souvent qu'on vienne lui «partir» le four à microondes. Article de cuisine ultimement essentielle dans la cuisine de Suzan parce que ses enfants, à son corps défendant, raffolaient de «pidzâ pis d'pogo». Suzan préférait bien sur nourrir ses enfants avec des soupes aux légumes ou de bons mets cuisinés maison, mais ses talents culinaires, décriés publiquement dans les sourates de Lachine, ne menaient qu'à des gibelottes d'épouvante. Au goût, la gastro…nomie de Suzan saisissait la gorge et coupait l'appétit des vivants. Elle disait se souvenir de la façon dont sa mère faisait les plats traditionnels d'une maisonnée respectable [elle s'exprimait avec d'autres mots], mais notre Suzan avait davantage l'air de jouer à shuffle avec ce qui gisait dans le frigo ou ailleurs pour concocter ses ''recettes''. Tout ce qui lui tombait sous la main finissait dans la casserole du soir. Il y a eu le fatidique soir de novembre durant lequel Suzan rendit malade à la table son fils. Durant la journée, le jeune Piayeluc en quête de nouvelles expériences scientifiques avait pris les arachides de son sac de bonbons d'Halloween et les avait broyées pour tester un beurre d'arachides homemade. Dans le processus, Piayeluc s'était surement fatigué et intéressé à autres choses et avait laissé la poudre d'arachides sur le comptoir de la cuisine. Il n'en fallait pas plus pour que Suzan fût prise par l'envie de mettre le fruit du labeur de son fils dans un ragout de bœuf aux légumes. «Un stew vet'namien» s'entêta à répéter la grotesque cuisinière à qui voulait bien l'entendre. «Maman ça goûte pas bon dans ma bouche, j'aime pas ça. Je vais vomir, j'te l'jure, maman, c'est pas drôle» avertit le jeune Piayeluc. «Arrrrrrrrahit de niaiser pis mange!» lui répondit la légendaire Suzan en colère! La gorge de Piayeluc se verrouilla. Rien ne pouvait plus y descendre mais tout pouvait remonter et c'est ce qui se produisit. Piayeluc dans un jet nullement flasque expulsa la gadoue maternelle du ''Vietnam'' sur la table. Faniev se rappela toute sa vie la forme qu'avait pris le vomi expulsé par son jeune frère qui était tombé sur la table comme une haute tour de glue moulée par l'œsophage. De pizzas et de pogos les enfants de Suzan? Assurément par instinct de survie.

jeudi 18 novembre 2010

Suzanneries – Part I


 Suzan One Oh One
 
Rothmans King Suz
«Rince les pâoutes, l'amidon ça fait engraisser!» dit Suzan à sa fille un peu toutoune. La boîte de beignes Drunken Donuts gisant ouverte sur la tablée pour le dessert. Ils ont été rapportés par Faniev parce qu'elle travaillait dans cette ''pâtisserie''. Faniev, friande de ces sucreries frites faisait ainsi deux pierres [aux reins] d'un coup et trimait dur chaque dollar qu'elle gagnait avec ses deux jobs. Pour cette ''petite'' fille, la vie fut son seul mentor et son parcours à travers lequel elle soutenait sa famille à bout de bras est relaté dans les sourates de Lachine. À l'instar du concept de l'Inconscient défini par les philosophes comme étant ''la folle du logis'', Suzan était connue pour flirter avec l'irrationnel et les mauvaises décisions économiques. Sa progéniture restait donc obligée de lui montrer la voie non pas vers l'épargne ni la contrition budgétaire (concepts déjà connus par une Suzan un peu cheap), mais plutôt vers l'éthique et l'importance du travail menant à la propriété foncière. Faniev avait donc été conçue dans cet esprit par le divin, à savoir qu'elle était née en tant qu'extension neurale pour Suzan. Tel un programme informatique spécial implanté à même la matrice Suzan-Portefeuille, Faniev avait, dès sa tendre adolescence, le réflexe de débiter son propre compte pour ses activités [tout de même]  sportives. Suzan avait alors assez d'argent pour «faire la commande» et acheter des cigarettes «aux Indiens». Les listes d'épicerie regorgeaient donc de produits à l'orthographe aléatoire d'une Suzan analphabète qui, par bonheur, maintenant achetait à ses enfants des ''aliments'' jusque-là jugés prohibitifs. Ainsi les «Fruit of the loop» (Fruit Loops™)  et les «Pot de tard» (Pop Tarts™) firent leur entrée dans l'humble loyer de Suzan-Famille. Le luxe inouï de tout ce sucre motivait maintenant la maisonnée et donnait espoir qu'un jour une grande prospérité chasserait l'angoisse et viendrait à bout de la mentalité de victimes de l'Injustice qui avait toujours régné pour ceux qui suivaient Suzan depuis leur naissance.  

mardi 16 novembre 2010

Stratégies culinaires libérales. Au menu : la corruption, comment s'en sortir?

John the Great

Nous voici Libéraux d'un jour. En introspection, nous allons nous mettre dans la peau d'un pur et dur chef du Parti Libéral du Québec et d'un stratège quelconque de ce triste groupuscule. En fins psychologues nous tenterons de comprendre les motifs qui poussent le Premier ministre à refuser obstinément que la lumière soit faite sur les allégations d'irrégularités du financement des partis politiques. Que se passe-t-il dans la tête du chef de notre gouvernement actuel? Quelle est la véritable stratégie du Parti Libéral du Québec en refusant de façon obsessive une commission d'enquête publique sur l'industrie de la construction? Collusions, magouilles et informations cachées sont mots d'ordre mais, la population ne doit surtout ne rien connaître de ce qui se trame dans les coulisses de l'exécutif et au sein des rangs du parti (deux entités aux frontières poreuses). Boutonnons donc notre cravate de chef d'État et chantre du parti écarlate et élaborons la stratégie qui réussira à nous faire conserver le pouvoir ou au pire à éviter de se voir complices de corruption, associés au crime organisé et de connaître une déconfiture qui nous suivra pendant plusieurs élections (à l'instar des Libéraux fédéraux).

Incarnation

I am Jean Charest. Au meilleur de ma connaissance, je suis [un] innocent. En tant que Premier ministre, je suis le confident de choix pour mes ministres et mes députés. Leurs pépins et défauts de compétence peuvent rejaillir sur moi et éclabousser ma crédibilité et celle de tous les membres de mon gouvernement. Je me fais donc l'oreille attentive et je suis nécessairement au courant des allégations et des relents de corruption qui flottent dans plusieurs milieux de la politique (municipale, provinciale, à l'intérieur des ministères etc.). Je suis au courant des soupçons partagés par la population au sujet de la nomination des juges sur des critères partisans (je ne suis pas nécessairement responsable, mais je sais que la population ne me croit pas). Ma vision des affaires de l'État a fait en sorte qu'à chaque fois que j'entendais des informations concernant des violences et de l'intimidation au sein des syndicats pour l'octroie de gros contrats de construction gouvernementaux, concernant le blanchiment d'argent mafieux dans d'importantes entreprises de construction partout dans la province, concernant la présence de prête-noms dans des compagnies qui contribuent en masse dans la caisse électorale du Parti Libéral, concernant la nomination partisane de la magistrature [!!!!]  etc. je tentais d'amalgamer ces petits scandales dans une marmite et d'espérer de toute mes forces que le couvercle ne cède jamais! Mon erreur est monumentale en ce sens qu'à cause de mon inaction dans ses dossiers corrosifs, maintenant aux yeux de la population à la mémoire courte mais à l'esprit vif, tout ce qui est dans la marmite pourrait remonter la piste jusqu'à mon bureau et faire en sorte d'exposer mon incrimination potentielle dans l'une ou dans toutes ces affaires réunies. Lire : la population voit tout le dossier de la corruption au Québec comme étant dans une seule et même gadoue qui cuit dans la marmite. Nous verrons donc avec les stratèges de mon parti comment se sortir d'affaire pour ne pas être (en)tachés par le ragoût qui menace de sortir.  

Du pain, des jeux…des enquêtes publiques

I am a stratège liberal. Ce bouilli est très chaud, Monsieur le PM! Sous le couvercle, de grosses bulles se forment et éclatent. Lors de brefs accalmis il est possible de retirer le couvercle et d'allonger une louche [le mot est choisi] pour transvider une partie du bouillon dans une petite casserole réduisant ainsi le contenu de la marmite. REFERMEZ IMPÉRATIVEMENT LE COUVERCLE PAR LA SUITE. Lire : Nous sommes en cris[e] Monsieur le PM! Un ancien ministre de la Justice [Marc Bellemare, pour ne pas le taire] a l'intention de dévoiler tous nos secrets internes concernant la gouvernance du Judiciaire. Il raconte déjà les faits aux journalistes et son rang de ministre impose la crédibilité et la confiance passée du gouvernement envers sa personne. Ses propos sont subversifs et même s'ils sont absolument faux, nous en sommes [trop] surs, Monsieur le PM, nous sommes foutus et nous devons le faire taire. Sommez-le d'une poursuite personnelle, Monsieur le PM…pour diffamation à votre endroit! Quant au peuple exposé aux harangues du ministre déchu, qu'on lui donne du pain et des jeux! Nous devons rétablir notre apparence d'innocence avec une commission d'enquête sur le processus de nomination des juges. Le résultat et les conclusions du commissaire ne nous importent pas! Les allégations qui sortiront de cette enquête publique ne sont que des médisances d'un ministre et d'une disquette retrouvée entre deux tranches de pain par sa femme. Aucune preuve sérieuse n'en ressort. L'eau nous coule comme sur le dos d'un canard et en plus, Monsieur le PM, nous donnons l'impression de rechercher la vérité. N'oublions surtout pas, Monsieur le PM, que pendant que nous nous évertuons à écouter cette commission d'enquête et à y participer en toute bonne foi, tous les yeux des plébéiens sont retournés vers la petite casserole et non vers la pleine marmite.

Pourtant et malgré nos efforts à garder votre tête hors de l'eau, Monsieur le PM, certains acteurs de la plèbe aidés par l'opposition [au régime] semblent en colère contre votre inaction à «regarder les choses en face» et à commander une enquête visant à déterminer l'influence du crime organisé dans l'industrie de la construction. NE CÉDEZ SURTOUT PAS À LA TENTATION DE NOUS DÉLIVRER LA PLEINE MARMITE SUR LA PLACE PUBLIQUE [Amen]! Le bouclier bienfaisant de la police vous protègera, Messire Charest. L'industrie de la construction avec ses intimidants travailleurs (donnant des conférences de presse habillés à la mode ''bicycle à gaz'' pour dire au public que TOUT va bien et que PERSONNE n'est l'objet d'intimidation!) et ses syndicats gérés par des sympathisants mafieux et des corrompus est un milieu extrêmement violent. Seuls les agents de la paix des corps policiers peuvent mettre la lumière sur les sombres relations que les syndicats entretiennent avec le milieu de l'ombre. La police reste discrète, car se sont des affaires criminelles qui feront l'objet de filtre par les tribunaux et elles ne doivent pas faire surface dans la sphère publique et cela même si ces travailleurs sont payés avec l'argent des contribuables! Oui Monsieur le PM, il est vrai que le contribuable québécois paie [beaucoup] plus cher pour les travaux publics de construction que dans d'autres provinces canadiennes. Alors une commission d'enquête aboutirait nécessairement sur la collusion des entreprises entre-elles pour un appel d'offres plus alléchants en terme de dollars investis, voire sur la preuve concrète qu'une mafia chapeautant l'octroi de contrats aux firmes leurs étant soumises pousse les prix des travaux à la hausse aux frais des contribuables. Notre inaction en notre connaissance des implications criminelles des salariés, de leurs firmes et de leurs syndicats serait alors mise au grand jour et nous serons maudits à jamais, car vous êtes déjà au courant que ce levier mafieux est présent dans la province. Nous devons empêcher à tout prix cette commission d'avoir lieu! Le peuple, dans son ironique stupidité, a décidé d'exiger que le ménage soit fait maintenant alors que nous sommes au pouvoir. Nions! Nous ne ferons aucun ménage, ce n'est pas à nous de le faire! La police le fera et étalera l'information au compte goute dans les médias, alors si nous sommes éclaboussés, ce sera petit-à-petit, la mémoire courte de l'électorat fera le reste. La capacité de digestion du peuple, Messire le PM, ne pourrait pas supporter en si peu de temps toute la fange d'informations expulsées au grand jour dans une commission d'enquête qui ne dure que quelques semaines. Petit calcul politique pour éviter les calculs rénaux, Monsieur le PM.

En attendant voguons de crise en crise vers les prochaines élections en gardant les deux mains (et les doigts croisés) sur le gouvernail de l'État. Si nous sommes taxés de coopérer indirectement avec le crime organisé, rappelons joyeusement notre rôle politique à ces amateurs de l'opposition : c'est celui de nous laver les mains des échecs des derniers gouvernements péquistes, car ils n'ont pas su appliquer les conclusions d'une commission d'enquête déjà créé à ce sujet. Le parti est muselé et est paré pour le prochain conclave, monseigneur! Les délégués ont été fouettés à cet effet, ils ne nous questionneront pas sur la tenue d'une telle commission! Si la grogne et la pression sur notre caucus montent, Monsieur le PM, lancez des menaces de poursuite au civil pour atteinte à votre réputation, ça semble fonctionner et ça donne un beau spectacle médiatique. Les clowns de l'ADQ ont leur raison d'être en ayant enfin la chance de faire le travail pour lequel ils ont été élus…Pendant ce temps, rappelons-le encore judicieusement, Monsieur le PM, que la pleine marmite bouille tranquillement à l'abri des regards.



vendredi 12 novembre 2010

Populisme américain

YAY!! Waving Sarah
Aux states, prenons le thé avec Sarah Palin, une amie qui nous paraît proche et conviviale telle une mère du West Island qui va porter ses enfants au club de soccer Lakeshore dans son Range Rover. Assoyons-nous quelques minutes avec cette femme politique maintenant associée au mouvement Tea Party qui fraie quelquefois avec le Parti Républicain et quelquefois avec l'impressionnant réseau de milices pro-fusils, pro-fétus et pro-jésus (généralement et curieusement les trois vont ensemble et paraissent indissociables). Demandons-lui la raison de cette association : Pourquoi, Sarah, buvez-vous de ce thé? Nous savions déjà que vous étiez sympathique à ces causes et légèrement dévote de votre personne, mais vous surfez maintenant sur la vague d'insatisfaction populaire et vous incarnez ce mouvement décrié comme étant anti-establishment, vous, candidate colistière en 2008 pour la vice-présidence des États-Unis! Êtes-vous comme ces gens réclamant un retour puriste à la Constitution originelle menant à une présence amoindrie du gouvernement dans les affaires sociales et économiques? Êtes-vous populiste, Madame Palin?

Pour déterminer le populisme émanant de la personnalité politique de Sarah Palin et du mouvement Tea Party il faudra associer quelques mots fétiches de cette idéologie et vérifiez si ces mots collent bien à notre tandem. En fait, excusez l'exercice un peu futile, car, selon moi, c'est une blague de demander si Tea-Palin sont populistes : l'évidence vous viendra peut-être aux yeux avant la fin de ce texte, c'est l'objectif. Nous allons tout de même nous prêter au jeu et regarder la liste des vocables clés du populisme fournie dans le #1042 du Courrier International en page 63.

Amour

Voyez le mot plutôt comme s'il était accompagné de son antithèse logique. On le dit souvent : amour-haine. Le populisme est en fait «amour» qui porte à la «haine» de ce ET ceux qui ne sont pas inclus dans ce qui sera désigné ici le «projet commun». Donc ce projet cher aux yeux de groupe encourage la haine envers les non-adhérents.

 Notre tandem Tea-Palin est en fait amoureux de l'Amérique («des states» plus familièrement) et font du patriotisme leur chasse-gardée. Dans leur appropriation quasi exclusive du concept de patriote et d'amoureux de l'Amérique, ils rejettent donc l'autre Amérique, celles des Démocrates (qu'ils appellent volontiers «Liberals») leurs démons qui causent tous les maux dont souffre le pays : chômage, crise économique, sauvetage des banques et des grandes entreprises, dépenses gouvernementales «inutiles» etc. Le Tea Party se pose donc en défenseur des valeurs américaines spoliées par un président «impropre et socialiste» cristallisant ainsi le duo amour-haine caractéristique du populisme.

Chambres

Le populisme est vu comme le résultat d'une déception populaire en ce sens qu'il provient d'une désillusion et d'un déficit de confiance envers les élus qui sont vus comme étant inébranlablement élitistes et corrompus. Les politiques sont en fait inaptes et protègeraient des intérêts qui vont à l'encontre du bon sens («sanity»). Il y a donc une volonté du populisme de renverser cette tendance et d'être un rempart contre la démocratie représentative telle qu'on la connaît aujourd'hui en parachutant la rue («main street») à l'intérieur des murs du parlement.     

En fait, c'est que nous avons pu remarquer dernièrement lors des législatives américaines de mi-mandat qui a vu la chambre des représentants passer aux mains des Républicains avec des militants du Tea Party notoires dans leurs rangs. Concrètement leurs revendications se traduisent mal dans l'environnement législatif des chambres, car ils se réclament comme des tenants du «moins de gouvernement» ce qui laisse les analystes politiques perplexes quant à leur véritable utilité en chambre. Pensons aux balbutiements de Joyce Napier décrivant les nouveaux arrivants du Tea Party en chambre comme ayant des objectifs inconnus à part leur ras-le-bol tous azimuts et cela au sein même d'un parti crédible : le Parti Républicain. Ces politiciens sont en fait des baromètres et représentent non pas les citoyens et l'intérêt commun d'une population, mais plutôt les frustrations sporadiques d'une frange émotive et mobilisée de l'électorat.

Impôts

Les impôts au sens large amènent l'ensemble des citoyens à contribuer pour le fonctionnement de la société et dans le pire des cas, pensais-je,  peuvent être vus par certains individus vexés par la TPS-TVQ comme étant une «pénalité supplémentaire». Cependant, aux yeux des populistes les impôts ne sont ni plus ni moins vus comme un «vol de l'État».

Les Tea Partyers ne sont non seulement pas heureux que leurs impôts finissent dans le ventre des grandes banques ou dans les mains quêteuses des constructeurs automobiles, mais ne sont pas heureux avec le concept de dépenses gouvernementales point. Ils sont issus de franges très conservatrices de l'Amérique de la libre-entreprise. Qui dit libre-entreprise, dit fiscalité au mieux inexistante, dit dérèglementation, dit également non-ingérence gouvernementale dans les affaires des «humbles citoyens»… Il est clair dans leur esprit que l'Amérique fut fondée sur ce schème économique et toutes les formes de fiscalité sont en fait le suppôt de l'État inquisiteur niant la valeur fondamentale de liberté américaine d'origine. Donc oui, l'impôt est un mot clé du populisme et sa vision hautement négative n'échappe au thé aux saveurs de sédition servi en ce moment aux Etats-Unis.

Islam

C'est le mot du lexique choisi par l'auteur italien qui collerait d'avantage aux populismes européens, mais son sens xénophobe et raciste pourrait être appliqué au populisme américain du Tea Party. Effectivement et de façon implicite, le Tea Party est un groupe raciste. La base du mouvement s'appuie d'abord au niveau de chaque État sur des petits groupes d'extrême droite parfois armés qui ont choisi de canaliser le mécontentement économique par une défense de leur propriété par les armes partant de la pensée que «le gouvernement ne peut m'enlever ce qui m'appartient et je dois défendre mes droits et surtout celui de détenir une arme». Ce sont des milices blanches aux visées racistes qui n'hésitent pas à déguiser leur racisme en se disant plutôt «natalistes» en arguant que le président des États-Unis devrait être natif du territoire (ce qu'ils refusent de reconnaître à Barack Obama né à Hawai, pourtant un État de l'union). Les natalistes sont aussi les premiers à s'indigner d'un des prénoms du président actuel : «Hussein»!

Plusieurs ONG et journalistes travaillant sur tout le territoire américain confirment une résurgence, voire une multiplication des groupes de droite radicale et ne se cachent pas pour affirmer que la source de cette agitation réside dans le fait que l'occupant de la Maison Blanche soit de race noire. La question avait alors été posée dans les média américains : Que ferait le gouvernement si le pays était criblé de groupes Afro-américains, armés, suprématistes noirs et anti-gouvernementaux?

Sans doute, le Tea Parti vient capter cette agitation et lance un message non-dit au sujet du facteur racial au Etats-Unis dans cette campagne électorale se faisant le porte-voix populiste de groupes racistes et radicaux.

Liberté

Le lexique le décrit comme «le mot le plus galvaudé par le populisme contemporain». En fait, le message véhiculé par les chantres du populisme vise à rétablir un état ou la liberté prévalait ou du moins une impression de liberté. C'est encore une fois un message ou l'ingérence des élites met un frein à la liberté du peuple.

Nul ai-je besoin d'en dire davantage au sujet des doléances dans un langages orduriers des animateurs d'émissions radio (poubelle) du Tea Party qui clament haut et fort que la constitution des pères n'est pas respectée et que la liberté du citoyen est enfreinte par les lois restrictives du gouvernement dans toutes les sphères de l'activité humaine…(je me demande où étaient ces défenseurs de la liberté quand le Patriot Act a été proposé par George W. Bush et ensuite adopté par le Congrès). La liberté du peuple est à la dérive et un besoin de restauration par la prise du pouvoir est ressenti comme la solution, voire comme la revanche des opprimés.

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Sarah et moi, étions donc en train de boire du Lady Earl Grey quand je lui ai fait part de mon intention de parler du Tea Party et du parfum de populisme qui s'en dégageait. Elle regarda alors nerveusement sa montre et me jura qu'elle devait absolument partir pour prendre ses enfants au club de soccer Lakeshore... Elle affirma vouloir me «reviendre» avec ses opinions sur le sujet une autre fois.  

jeudi 11 novembre 2010

Louise Arbour égérie (?) du Darfour

Ce billet fait référence à l'entrevue télévisée accordée par Louise Arbour à Radio Canada le 08-11-2010. Madame Arbour interrogée sur sa perception des efforts canadiens en Afghanistan a fait référence au ''pouvoir central de Khartoum (sic)''. Voir ici qu'elle aurait plutôt dû faire mention de ''Kaboul''.

Louise Lapsus Arbour - She is loved
Sous le choc, j'ai très mal dormi. J'exagère à peine. J'ai beaucoup de misère à envisager que Louise Arbour dépêchée en tant que haute fonctionnaire de l'ONU au Soudan et puis en Afghanistan en tant que directrice d'une ONG (pour ne nommer que ces deux pays-là) en arrive à mélanger les deux capitales de ces États. J'avais toujours cru jusqu'à lors qu'un plafond de verre empêchait ces gens qui ne savent pas où se situe l'Irak sur une carte ou la différence fondamentale entre Bucarest et Budapest d'occuper des postes importants (et cela dans tous les domaines d'activités). J'avais un préjugé sur ceux qui, encore plus chanceux, représentaient la crème du réseau diplomatique mondial et qui incarne la bureaucratie transnationale onusienne. Je m'attends à une connaissance sur le bout des doigts des lieux, des langues, des cultures et peuples de la Terre par cette intelligentsia qui parcourt le globe pour recenser, répertorier, connaître et aider nos semblables humains. Le préjugé étant qu'une simple et sotte association sonore entre deux noms de villes ne pouvait pas sortir de leur bouche créant ainsi un lapsus géographique majeur! Pensons à ce que j'envisageais comme étant le fonctionnaire typique de l'ONU avant cet événement : Le sous-sous-sous-secrétaire qui classe les mémos et apporte le café au sous-sous-sous assistant de Ban Ki-moon est en fait un Chileno-Slovène de 34 ans qui a un post doctorat en sociologie et études culturelles (parcours effectué dans 3 universités différentes sur autant de continents), s'exprime couramment dans au moins 5 dialogues du bantou et peut énumérer en ordre toutes les stations de la ligne Shinjuku (la ligne vert-pâle) du métro de Tokyo.

Je me suis trompé. Mon tissu de croyances s'est déchiré ce soir-là lorsque Madame Arbour, à mes yeux, grande prêtresse du droit international, prononça le glas du respect aveugle que j'avais pour la classe des nomades diplomates. La question que je me pose maintenant en introspection est la suivante : Pourquoi suis-je déçu? Comment une égérie éprise de la Justice des peuples et estimée de tous peut-elle ainsi faire un lapsus aussi dérangeant? Dérangeant pour moi? Oui, parce qu'une image parfaite et idéale est ainsi vite détruite. Je me déteste de ne plus l'aimer. Que me faudra-t-il pour raviver la flamme que j'avais pour sa passion et pour son dévouement auprès des opprimés et des oubliés des conflits mondiaux? Pourquoi tant de philanthropie du terrain vient-elle à être effacée de ma mémoire par un simple détail de diction? Serait-ce en fait de la jalousie déguisée de ma part? Je ne sais pas et ce que je sais c'est que je me sens comme ce Chileno-Slovène qui apporte du café et que pour moi Khartoum est très très loin de Kaboul.